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XX- Annexe (suite)
 

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Suite de l’annexe (1ère partie)

Restitution par le Canevas de tir.

L’ensemble des positions examinées, vues sur photos et restituées par le Canevas de tir, s’élève à 59.

Toutes ces positions sont très exactement repérées, sauf deux où l’emplacement restitué (1386 et 1568) correspond à des abris situés à 50 m. où 25 m. derrière la vraie position des pièces invisible sous les arbres.

Pour quelques autres positions, quoique la restitution soit absolument exacte, et du fait qu’elle s’applique à des travaux existant réellement sur le terrain, l’interprétation est erronée en ce sens que ce qui est porté comme alvéoles de batterie correspond en réalité à des abris.

Par contre, pour des positions non vues nettement sur photos, le Canevas de tir a restitué très exactement les pistes qui y aboutissent (2772) ou des travaux dépendant de la batterie et s’y reliant parfaitement (3067).

Dans un autre cas (1368), le Canevas de tir porte avec précision quatre abris avec pistes là où sont constatés deux emplacements d’obusiers de 15.

On doit donc conserver aux restitutions du Canevas de tir l’absolue confiance qu’elles inspirent actuellement. Les indications qu’il porte sur le plan directeur se sont révélées absolument exactes.

Les rares erreurs d’interprétation de travaux qui s’y trouvent proviennent souvent du rapprochement de travaux imprécis vus sur une photographie, de repérages d’activités faite dans le voisinage immédiat.

C’est la cas pour les exemples cités plus haut.

C’est également le cas de la position 1469, le long de la route PINON-CHAVIGNON, où on a constaté seulement un caniveau téléphonique avec trois cavités (sapes) analogies à des alvéoles, mais n’ayant rien de commun avec une batterie. Cependant, à repérages précis (1 de S.R.S., 1 de S.R.O.T.) s’appliquent exactement à cette position. L’explication en est donnée par la découverte près des vallons d’un auto-canon qui circulait sur cette route. Il a d’ailleurs donné lieu à d’autres repérages de S.R.S. exactement sur cette route.

Travail des S.R.A.

Les constatations précédemment faites s’appliquent en réalité à l’ensemble du travail de repérage contrôlé et mis au point par les S.R.A. de C.A. Les résultats montrent que ce travail a été très satisfaisant et que la mise au point des observations faites a été très convenable.

Les S.R.A. de C.A. doivent connaître à fond le fonctionnement des sections de repérage et, en particulier des S.R.S. en faisant, s’il y a lieu, un stage de quelques jours dans une de ces unités qui leur est voisine. C’est la meilleure façon de pouvoir apprécier comme il convient les renseignements donnés par les chefs de S.R.S. et pouvoir les exploiter judicieusement.

Résultats des tirs effectués.

  • a)Caractéristiques des positions.

Sur l’ensemble de 90 positions examinées, 9 seulement étaient casematées soit 10% et encore ces casemates étaient-elles seulement constituées par une ou deux couches de rondins surmontés d’une tôle ondulée.

Par conséquent, l’on peut dire que l’ensemble des positions qui se trouvaient au Sud du Canal étaient justiciables des calibres normaux d’artillerie lourds en ce qui concerne les positions de pièces.

Il n’en est pas de même pour des abris à personnel qui dans beaucoup de positions, étaient très profonds, quelques-uns à près de 10 mètres de profondeur.

Beaucoup de ces abris ont été retrouvés intacts ; les autres avaient leurs entrées éboulées.

Par contre, les positions n’avaient pas d’abris et comportaient simplement des alvéoles plus ou moins établis, quelquefois même à peine ébauchés ; 5 positions étaient munies d’abris légers sans résistance et 4 d’abris en superstructure (régions marécageuses de la forêt de PINON) à 2 rangées de rondins ne pouvant résister à un tir méthodique de 155.

Les premières de ces positions étaient presque toutes des positions de fortune occupées pendant la préparation très probablement par une batterie, dont la position principale avait été soumise à un tir de destruction.

Le camouflage, en général, était très soigné, comme toujours, et composé essentiellement de matériaux trouvés dans la nature (terre, végétale, branchage, troncs d’arbres avec branches et feuillages disposés sur un treillis métallique recouvrant les emplacements des pièces).

D’autre part, discipline d’occupation très sévèrement maintenue : abords respectés, peu de pistes ; les dépôts de munitions au bord des routes, peu de circulation de voitures de ravitaillement en dehors des routes, à moins que les pistes ne soient sous bois ; quand la position est en lisière de bois aucune trace de circulation devant la lisière.

Quelques positions de ce genre en lisière de bois ou le long des routes ont échappé à nos avions en raison de ces précautions et du fait (confirmé maintes fois par les ordres du Commandant ennemi saisis dans les positions conquises) que toute position survolée par les avions ennemis doit cesser immédiatement son tir.

A signaler également une autre précaution observée par l’ennemi et constatés souvent par les S.R.S. de l’Armée, dan un certain nombre de cas et surtout quand il s’agissait soit de positions nouvelles ou de calibres nouveaux : tout tir de ces positions était accompagné d’un tir simultané effectué par une ou deux autres positions. Cette prescription suivie par l’ennemi dans différents cas a gêné souvent les S.R.S. dans leurs repérages.

Malgré ces précautions, comme on l’a vu, l’ensemble des positions était en grande partie connu de nous. Toutefois ces mesures ont empêché beaucoup de repérages sur photographies et ont gêné la précision du repérage à vue directe.

Les dépôts de munitions des batteries étaient situés, soit à la position, soit le long des routes et chemins voisins, de même qu’à certains endroits de la voie étroite de PINON, surtout entre le Château de PINON et la ferme de ROSAY. Dans les batteries, en général, les quelques dépôts qui restent en état montrent que l’ennemi cherche à soigner ses munitions en les plaçant dans des abris étanches plus ou moins bien achevés, suivant les moyens dont il dispose.

  • b)Tirs de destruction.

L’examen de l’ensemble des positions vues sur le terrain montre que les effets de nos tirs se répartissent de la façon suivante :

Destruction totale50%
Destruction partielle, mais suffisante
pour rendre la position intenable7%
Position bombardée, mais sans densité suffisante
du tir pour la rendre intenable19%
Sans tir systématique24%

L’ensemble des tirs efficaces de destruction s’établirait donc à 57%. Les tirs se rapportant plutôt à la neutralisation se monteraient à 19%. Ce fait tient surtout au mauvais temps et à la brume qui a gêné les réglages pendant plus de la moitié de la préparation.

Par contre, la proportion de positions n’ayant pas subi de tir systématique semble forte : 24%. Il faut toutefois tenir compte de ce fait qu’une bonne partie de ces positions (plus de la moitié) comprend des positions de fortune occupées pendant l’attaque, et le reste est composé d’emplacements trouvés sans matériel, ou non repérés comme très bien camouflés et n’ayant jamais tiré quand ils étaient survolés par nos avions (positions le long des routes en particulier).

Les destructions de positions, surtout là où les 272 et 280 ont été tirés, sont complètes. Le sol est bouleversé, des pièces détruites, des casemates et abris effondrés.

Le matériel retrouvé sur les positions et endommagé ne donne pas une idée complète des pertes en matériel subies par l’ennemi. De l’interrogatoire des prisonniers, il ressort, en effet, que pour un certain nombre de positions le matériel hors de service a pu être retiré et remplacé. Dans une position de 150, trois pièces ont été mises hors de service. Remplacées le lendemain, les 3 nouvelles pièces, retrouvées d’ailleurs sur le terrain, ont été de nouveau mises hors de combat par nos tirs.

Tirs d’interdiction
En dehors des interrogatoires des prisonniers qui tous affirment nettement la grande efficacité de nos tirs d’interdiction à obus explosifs ou à gaz, l’examen du terrain a montré que les tirs d’interdiction avaient été particulièrement efficaces en certains endroits et surtout dans les grands courants de circulation indiqués avant l’attaque. Dans beaucoup d’endroits, la chaussée est rendue impraticable et il reste des indices des effets sur le matériel et sur le personnel, surtout sur la route PINON-CHAVIGNON (auto-sanitaire renversé, chevaux morts, caissons et chariots surpris en plein ravitaillement, auto-canon endommagé sur la route, munitions renversées, etc.).

Les seuls ravitaillement partiels ou relèves qui ont pu avoir lieu et à grand-peine au dire des prisonniers, l’ont été pendant les quelques heures où nos tirs d’interdiction fléchissaient, ce qu’ils ont observé très généralement entre 4h et 7h du matin.

Quelques tirs d’interdiction sévères sur des carrefours ont été non seulement efficaces sur la circulation, mais également sur des positions voisines mal connues (3067 par exemple).

CONCLUSIONS.

De toutes ces constatations, on peut conclure :

  • 1)L’ensemble des positions ennemies était bien connu avant l’attaque ;
  • 2)Les repérages des S.R.S. et S.R.O.T., bien discutés et bien interprétés, ont une grande valeur et on doit donner à cs unités tous les moyens en personnel (nombre et surtout qualité) pour augmenter leur rendement ;
  • 3)Les repérages par l’Aéronautique sont toujours de grande importance. Leur mise au point par entente entre les officiers de renseignements de l’Aéronautique et les S.R.A. de C.A. a été bien exécutée ;
  • 4)La précision des restitutions du Canevas de tir est confirmée. Les seules erreurs constatées, en nombre très restreint d’ailleurs, ont trait à l’interprétation de la nature des travaux restitués ;
  • 5)Le travail des S.R.A., rapprochement et discussion des divers repérages, a été correctement fait. Toutefois, il y a lieu d signaler l’importance qu’il y a à tenir compte des repérages anciens de positions silencieuses avant l’attaque et susceptibles d’être réoccupées, ce qui a été le cas pour un certain nombre de positions étudiées ;
  • 6)Les tirs de destruction ont été complètement réussis pour plus de la moitié des emplacements. Cependant une trop forte proportion (19%) d’emplacements semble ne pas avoir subi de tirs suffisants. Ce fait doit être attribué en grande partie au mauvais temps et à la brume qui a presque empêché tout réglage pendant la moitié de la durée de la préparation. En tenant compte de ce fait, les résultats sont très satisfaisants ;
  • 7)Les tirs d’interdiction (en tant que constatation sur le terrain) ont été bien exécutés et se sont montrés très efficaces. D’autre part, les interrogatoires des prisonniers montrent que leur intensité fléchit systématiquement à certaines heures, ce qui ouvre le passage aux mouvements de matériel et de personnel ; ces fléchissements sont absolument à éviter.

Le chef d’escadron
Chef du S.R.A. de l’Armée

VOILLAUME

VU :
Le Général Commandant
l’Artillerie de la VIe Armée.

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